(Delatour France, 2019)
Les loisirs sont importants et dans notre quotidien, il est bon de ne jamais les négliger pour notre bien-être. La lecture en fait forcément partie, et bien que Michael Jackson soit l’un de nos sujets de prédilection, il n’est pas forcément aisé de se faire sa propre sélection tant les parutions sont nombreuses. Il est vrai que les nouvelles et nombreuses biographies dans un schéma classique pourraient nous faire frôler l’indigestion tant on a le sentiment d’avoir déjà fait le tour de la question. A tort ou à raison, je ne serais donc pas attiré par un livre qui me semble être une commande, et dont l’auteur n’essaiera pas de creuser le sujet une fois son projet terminé.
Le fait d’évoquer Michael Jackson s’apparente à une longue quête de savoir et de fascination à travers le personnage et son art. Lorsque vous finalisez un projet qui lui est dédié, vous ne pouvez pas avoir fait le tour de la question, tant cet univers est vaste. Cette envie de repousser vos limites pour mieux l’aborder prend ici tout son sens. Les réponses à vos questions trouvées vous embarquent vers de nouvelles pistes, et c’est ainsi que de nouvelles idées émergent. Voilà pourquoi je tenais à saluer le travail d’Isabelle Petitjean qui sait se renouveler et évoluer par des ouvrages originaux évoquant des sujets riches et complexes à l’image de ce que je viens de décrire un peu plus haut.
Je ne reviendrai pas en détail sur ses deux premiers ouvrages qui ont chacun une chronique en ces lieux : je préciserai juste que leur successeur a cette même particularité de traiter un sujet précis dans l’univers du Roi de la Pop. Cette volonté d’entrer dans le détail, loin de la zone de confort d’un ouvrage au format plus classique, est ici à saluer. D’autant qu’un troisième ouvrage lié au monde Jackson démontre cette longue quête narrée plus haut et l’intérêt de l’auteure pour le sujet, de façon à mieux nous interpeller en tant que lecteur.
Il est donc temps de nous plonger dans cet ouvrage intitulé sobrement « Michael Jackson : Black Or White ? ». La question se pose dès l’énoncé du titre en reprenant un de ses plus grands tubes. Elle pourrait être interprétée de diverses manières et c’est ainsi que l’auteure va traiter ce sujet complexe. Ainsi, le raccourci sur l’apparence physique de la star pourrait de façon instinctive s’immiscer dans l’esprit du lecteur. Il en sera bien question dans cette profonde analyse de l’auteur, non sans occulter l’aspect musical, bien évidemment.
Michael Jackson a indéniablement atteint les sommets en tant que Roi de la Pop. Ce titre, prononcé initialement par Elizabeth lors d’un discours en 1989, n’était pas usurpé même si les véritables termes employés de « King Of Pop, Rock and Soul » étaient bien plus représentatifs du parcours de l’enfant noir de Gary. Ils résument ainsi cette volonté d’une musique éclectique s’adressant à un vaste public pour mieux franchir toutes les barrières. Mais comment parvenir à une telle prouesse ? Tout n’est pas tout blanc ni tout noir, justement…
La star a eu cette volonté artistique de mêler tous les genres et dans cette optique, je prends plaisir à faire un parallèle avec Jeff Porcaro, le batteur de Toto qui avait cette polyvalence et cet intérêt pour tous les styles musicaux. Toutefois, l’aspect commercial de la discographie du Roi de la Pop n’est pas occulté dans cet ouvrage. Cette soif de battre tous les records s’est traduite par un souhait de s’adresser à tous les amateurs de musique, peu importe leur(s) couleur(s), à l’image de ce paon, le seul oiseau qui parvienne à fusionner l’ensemble des couleurs comme Michael Jackson l’écrit lui-même au verso de l’album Triumph. Sans oublier le clip de « Can You Feel It », dans cette même veine, comme le précise très justement l’auteure.
Ce n’est pas pour autant que l’artiste n’a pas revendiqué ses racines à de multiples reprises. Après avoir été à bonne école et avoir grandi dans des maisons de disques comme Motown et Philadelphia International Records, on pourrait se souvenir du long-métrage The Wiz et de la vidéo « Remember The Time » avec un casting exclusivement noir. Toute la complexité du parcours et du personnage sont ainsi abordés, sans occulter les prises de positions politiques et engagées du début des années 2000 contre Tommy Mottola et Sony Music. Car c’est bien également de politique qu’il s’agit au fur et à mesure des pages.
L’occasion pour l’auteure d’évoquer le contexte historique d’une industrie musicale cantonnant chaque style musical dans son propre classement comme pour mieux l’enfermer dans un seul clivage. En effet, ce livre aborde totalement la question historique du sujet et je ne peux m’empêcher de faire le parallèle avec la chanson « HIStory » est ses nombreux documents d’archives pour l’illustrer. Nous avançon au fur et à mesure des pages pour nous plonger dans la discographie Jackson, non sans apprendre sur le contexte de l’époque. Ainsi, de l’enfant de Motown jusqu’au son R’n’B des années 2000, dans un schéma autant visuel que musical, nous avançons dans la discographie Jackson, pour saisir toute la subtilité d’un crossover davantage affirmé et assumé au fil des années quand l’artiste gagne en maturité. Dans cette expérience, l’influence de son producteur Quincy Jones est également évoquée, étant un autre adepte du crossover, aveugle aux couleurs de ses musiciens, pouvant passer de Sinatra à Brandy.
Et si finalement Michael Jackson n’était pas le Roi du crossover ? Ce livre m’amène de nouvelles questions. Et si finalement, ce n’était pas le but d’un livre que de nous interpeller et de nous pousser à la réflexion ? Dans ce cas, j’estime que la mission est accomplie pour l’auteure et je la remercie pour ce long investissement immortalisé en noir et blanc. Décidément…