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« Il était un Roi » de Christophe Boulmé

Compte d’auteur, 2024

D’une manière générale, je raffole des autobiographies et des livres rédigés à la première personne. Dans mes choix de lecture, j’estime qu’un témoignage du principal intéressé sera plus pertinent à suivre et à analyser.

C’est ainsi que je ne pouvais ignorer le nouvel ouvrage de Christophe Boulmé, bien connu des fans de Michael Jackson par ses travaux de photographe et de graphiste. En 2019, je m’étais déjà régalé à lire le livre « Michael » qui retraçait son parcours de directeur artistique du magazine Black & White dédié au Roi de la Pop, au point de collaborer avec ce dernier sur de nombreux projets. Il s’agissait bien là d’un rêve américain qui se réalisait pour le français, et ses nombreux travaux à travers les illustrations et photographies dédiées à l’idole étaient la plus belle des manières pour illustrer son récit. 

Près de cinq ans plus tard, Christophe réitère l’expérience avec « Il était un Roi » mais il s’agit bien d’un autre monarque à ses yeux cette fois-ci. Ceux qui le connaissent savent forcément qu’il est question de son chien Nadji qui l’a accompagné pendant plus d’une quinzaine d’années. Autant « Michael » était le témoignage d’une vie professionnelle qui voulait s’adresser au plus grand nombre, autant ce nouveau livre se veut plus intimiste avec une volonté de rendre hommage à une relation forte et complexe entre un maître et son animal aujourd’hui disparu. Dans son avant-propos, l’auteur exprime clairement sa démarche. Il ne s’agit pas pour lui d’une œuvre politique, ni militante, mais bien d’un duo qui va au-delà d’une relation classique entre un maître et son animal de compagnie. D’un certain côté, ce témoignage peut nous sembler singulier car Nadji est venu du bout du monde et son arrivée à Roissy est déjà toute une histoire à elle seule ! Dans les joies comme dans les peines, tout devient ainsi fusionnel entre nos deux protagonistes. A l’image d’un Nadji qui accompagne Christophe lors d’une séance photos et qui finit dans les bras de Sheila. Un autre moment important pour l’auteur lorsqu’il se retrouve face à son artiste favorite et que son compagnon à quatre pattes vient marquer la chanteuse de toute son affection. Ce trio résumé dans ces lignes évoque alors toute la sensibilité du photographe. Au fil du récit, on se prend d’affection pour ce chien et on ressent toute l’inquiétude de l’auteur quand les ennuis de santé apparaissent et qu’il faut se rendre au vétérinaire. Du vécu sans doute pour beaucoup…

Comme nous le raconte si bien l’auteur, au début des années 2000, les shibas, ces chiens de race japonais, ne sont pas aussi présents en France qu’aujourd’hui. Il est vrai que les réseaux sociaux n’existent pas encore et que le phénomène des mangas s’est bien développé depuis. Voilà comment Nadji est devenu le premier d’une lignée de shiba dans le quotidien de Christophe. S’en suivra Juba, parti également trop tôt, Baya, Arya et puis Tao. Les autres comparses sont bien évidemment au cœur du récit et on ne peut que les associer à cet hommage rendu à leur ainé. Il y avait une telle solidarité entre eux quand le plus ancien était malade que tout cela en est poignant. C’est bien d’une famille qu’il s’agit et c’est l’un des éléments à souligner dans cet ouvrage. 

En parcourant ces pages, de nombreux souvenirs d’animaux qui ont fait partie de ma vie de près ou de loin refont surface. Je me souviens de quelques caresses dans ma vie enfantine voulant garder avec moi des chiens d’oncles et de tantes ou de ma grand-mère. Ainsi,  je ne peux m’empêcher de sourire en repensant à Molly, Buck, Follette ou Granny. Au fil des pages, je me remémore alors ce jour où mes parents se décidèrent à prendre Buggy le caniche à la SPA durant mon adolescence, suivi d’Oscar quelques années plus tard dans les mêmes conditions. Au quotidien, je mesurais combien leur présence apportait un supplément d’âme à la maison. Quelques années plus tard, je me revois prendre la voiture et arpenter les alentours pour retrouver Whisky, le chien de ma sœur qui passait son temps à fuguer. Les retrouvailles étaient à chaque fois une joie à la hauteur de mon soulagement tant je craignais de le retrouver écrasé. A l’heure d’aujourd’hui, c’est un chat nommé Billy qui accompagne mon quotidien mais l’attachement reste le même et les amis des félins se retrouveront également dans le thème de ce livre. Je ne pensais pas les citer ainsi dans l’un de mes textes mais voici l’occasion parfaite de le faire. Bien évidemment, les pensées joyeuses sont vites rejointes par des moments plus douloureux lorsqu’il a fallu dire adieu à ces compagnons de route.  Cette émotion ne se dévoile pas toujours facilement aux regards des autres. Peut-être de la pudeur ou peur de la bien-pensance, allez savoir… Un peu comme si nous devions hiérarchiser ces peines mais lorsqu’on a vécu cette expérience, on se sent moins seul  lorsque Christophe nous partage ici ses adieux à Nadji. Par ces rires et ces larmes, on peut que s’identifier à ce témoignage. Je ne pourrais que plaindre ceux qui n’ont aucune empathie envers les animaux tant ils passent à côté de quelque chose dans leur vie. Ces compagnons leur rendraient tout cet amour au centuple et je ne peux m’empêcher de penser à Baltique car cette anecdote m’avait marqué à l’époque. Baltique était la chienne labrador de François Mitterrand, et le jour de ses funérailles, on avait pu voir toute sa tristesse immortalisée par quelques photos prises ce jour-là. Elle avait dû rester devant l’église alors qu’elle était peut-être plus malheureuse qu’un grand nombre de personnes présentes dans l’enceinte. Le chanteur Renaud en avait fait une chanson au texte poignant, offrant l’un des plus beaux hommages à une relation entre un maître et son chien. Je me suis décidé à l’évoquer  tant elle résume tout.

Je ne peux donc que vous encourager à lire ce livre. Si vous êtes fan du travail de Christophe Boulmé, ne manquez pas cette opportunité d’entrer davantage dans son univers. Vous pourrez ainsi davantage ressentir toute sa sensibilité. C’est par ses ondes ambiantes qu’un artiste peut s’exprimer et sans ses chiens, Christophe ne serait sans doute pas le même homme. Il fait un pas vers nous alors faisons de même en ouvrant ses pages tel un hymne à la vie.

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